FORMER UN GROUPE

La majorité des livre de règles vous recommande de former un groupe équilibré dans le style de l’équipe de base Donjon et Dragon : 1 guerrier pour la baston, 1 prêtre pour les soins, 1 mage pour les sorts, 1 voleur pour les pièges, 1 ranger pour tirer. Groupe qui peut être transposé dans n’importe quel univers avec les classes de personnages disponibles et remplissant en gros les mêmes fonctions. Je reconnais que c’est un groupe polyvalent, capable de s’adapter à n’importe quel scénario. Cela facilite grandement le travail du MJ.

Cependant, je préfère, et de loin, laisser mes joueurs choisir ce qui leur fait plaisir. D’abord, parce qu’ils s’imprègnent plus facilement de leur personnage, et qu’ensuite, ils en prennent la responsabilité m’évitant d’entendre par la suite des réflexions du genre : « ouais ! Mais de toute façon, c’est pas que je voulais jouer ».

De plus, en m’obligeant à devoir intégrer n’importe quel type de personnage, je m’oblige en même temps à travailler un peu plus, à me creuser les méninges pour regrouper tout le monde. Cela a grandement amélioré mes capacités d’improvisation. Cela m’a également permis d’imaginer des scénarios pour des groupes « déséquilibrés », sortant des sentiers battus ou des classiques du genre.

Un de mes amis MJ, va un peu plus loin : il fait des scénarios sans vraiment tenir compte des classes de personnage présents. Sachant que régulièrement, le groupe est constitué de 4 mages (disciplines diverses), un forgeron et une ranger, notre capacité d’impact est plus que limitée. Mais comme il dit : « c’est pas mon problème, à vous de vous débrouiller ». Cela nous a permis d’exploiter nos personnages d’une nouvelle manière, d’utiliser des sorts qui restaient habituellement au fond du grimoire et parfois même de prendre des risques qui ne nous étaient pas dévolus.

Au final, je préfère vraiment laisser les joueurs se faire plaisir lors de la création de personnage, tout comme je préfère ne pas être bridé par le MJ, le reste est affaire d’adaptation. De toutes façons, même si les joueurs choisissent la même classe de personnage, ils en ont une vision différente et si le jeu est bien fait, vous n’aurez que des personnages originaux autour de la table.

2/ SCENARIOS ENQUÊTE

C’est le type de scénario que j’ai le plus pratiqué. Biberonné à Agatha Christie, élevé avec Simenon et Sir Arthur Conan Doyle, j’ai surtout commencé à masteriser à l’Appel de Cthulhu et mes premiers scénarios – du commerce ou personnels – m’ont plutôt orienté vers l’enquête que vers l’exploration (un autre genre que j’aborderai plus tard).

Un scénario enquête commence par un crime : vol, meurtre, enlèvement, etc… Et pour ce faire, le meurtrier à besoin de 3 choses : un mobile, un moyen et une opportunité. D’où je tiens ça ? des séries policières.

  • le mobile : ou plus exactement Le Pourquoi. Le criminel doit avoir une bonne raison pour lui-même. Si c’est un dingue, son mobile sera farfelu mais aura néanmoins sa logique propre. Pour que votre scénario tienne la longueur, envisagez plusieurs criminels potentiels avec autant de mobiles logiques.

  • Le moyen : Le Comment. Pour les meurtres, le choix est extrêmement vaste, je vous épargnerez donc la liste. Pour les vols et les enlèvements – qui sont des vols de personne en quelque sorte – il peut y avoir de nombreux moyens et généralement une longue préparation qui dépend directement des protections en place autour de la personne ou de l’objet convoité.

  • L’opportunité : Le Quand. Qui dépend lui aussi de la préparation et des protections.

Dans la plupart des polars (livres, films ou séries), la découverte de ces trois éléments désignent assez rapidement le Qui, donc le coupable. Pour correctement découvrir ces trois éléments, il y a les indices qui vont donner des indications aux PJ enquêteurs. Là encore, 3 sortes d’indices à disposition :

  • indices matériels : ceux de la scène de crime : traces de pas, de sang, de lutte ; petits éléments laissés par les derniers visiteurs : mégots, chewing-gum… bref tous ce que vous voyez dans les polars.

  • Indices documentaires : héritages, actes de propriétés, prospections, arbres généalogiques ou autres documents d’état civil…

  • témoignages : les vrais et les faux, ceux qui incriminent et qui innocentent…

Si je vous liste tout cela, c’est parce que c’est à vous de prévoir cela dans votre scénario si vous voulez qu’il tienne une partie entière. De plus, vous devrez prendre en compte ce qu’apporte presque tous les Jeux de Rôle : la magie et autres dérivés. Quelles traces laisse la magie en cas de meurtre ou de vol ? Que permet-elle de détecter ?

Le plus intéressant dans un scénario enquête n’est pas de refaire un épisode de votre série ou livre préféré, mais de confronter vos joueurs à l’analyse criminalistique et médico-légale avec les moyens et les connaissances du monde dans lequel ils jouent. Un monde médiéval-fantastique offre des moyens totalement différents d’un monde contemporain, ou qu’un monde futuriste. Je vous conseille donc de bien revoir les fiches des PJ ainsi que le livre de règles avant d’écrire votre scénario, pour éviter que le crime ne soit résolu littéralement d’un coup de baguette magique ou « d’analyseur multispectral ionique » (si ça existe un jour dans un JDR) au bout d’une heure.

Autre problème qui peut survenir, c’est de savoir doser le trop ou trop peu d’indices. Dans ce cas, il vaut mieux commencer par le minimum. Et par la suite, en fonction de la vitesse à laquelle les joueurs avancent dans l’enquête, donnez plus ou moins d’indices. Il faut aussi arriver à évaluer la frustration des joueurs, qu’ils ne soient pas dégoûtés d’avancer trop lentement, sans leur servir le criminel sur un plateau. Pour ça, je n’ai pas de conseils, il faudra apprendre par vous même en fonction de vos joueurs.

Une règle commune à tous les JDR, pillez les classiques : tous les polars en livres, films ou séries sont source d’inspiration. Mais n’oubliez pas les ressources particulières de l’univers de votre jeu. Les scénarios enquête sont avant tout des scénarios de réflexion avec assez peu d’action, cependant je finis d’habitude par une baston avec le criminel : cela permet aux joueurs de se défouler après plusieurs heures de remue-méninges.

1/ LES SCÉNARIOS RENCONTRE

C’est un genre de scénario un peu particulier car le but est de faire en sorte que les joueurs forment un groupe à la fin. C’est le premier scénario à faire lorsque l’on commence un nouveau jeu et que les personnages ne se connaissent pas encore. Il permet surtout d’éviter de commencer par : « vous êtes tous dans la même auberge. Qu’est-ce que vous faites ? » formule facile, qui fonctionne mais qui lasse à la longue. Ce scénario doit prendre en compte chaque personnage individuellement, afin de trouver sa motivation à intégrer un groupe et faire converger les aspirations de chacun vers un but commun.

Plusieurs façons de procéder :

  • le recrutement : un homme riche organise une expédition (marchande, exploration, chasse au trésor…), il a besoin d’hommes de main à qui il propose une rémunération. Quand un joueur commence avec un nouveau personnage, il est rare qu’il roule sur l’or. S’ensuit une expédition de type quête classique où chacun peut faire montre de ses talents. Les parties voyage et bivouac servant de prétexte à des interactions entre les personnages pour montrer sa personnalité ou raconter son histoire (vraie ou inventée). C’est assez basique mais ça fonctionne plutôt bien.

  • L’enquête : sur la base d’une enquête criminelle classique (vol, meurtre, attentat…), les personnages s’y trouvent impliqués. Personnellement, je conseille de distribuer les rôles : 1 ou 2 joueurs engagés comme enquêteurs (chevalier, noble, prêtre, officiel…), d’autres joueurs peuvent être des témoins voire même avoir tenté d’empêcher le crime, les autres disposent de compétences utiles à l’enquête. J’aime bien ce genre, car il ne sont pas tous sur un pied d’égalité mais ont tous besoin les uns des autres.

  • Le voyage : chaque joueur doit avoir une mission personnelle, qu’il devra accomplir dans un lieu éloigné, nécessitant un transport. Tous les joueurs sont donc amenés à prendre le même. Le voyage débute normalement, les joueurs peuvent même commencer à faire connaissance entre eux. Durant une nuit, le transport s’écrase (ou fait naufrage, c’est selon). Bilan : quelques morts parmi les passagers et un moyen de transport hors service. Une petite enquête révèle que ce dernier a été saboté durant le voyage (pour ajouter un peu de paranoïa). L’intérêt d’un tel scénario est que les joueurs commencent avec une mission en tête et qu’ils se retrouvent en mission de survie, avec en plus le danger que les saboteurs soient avec eux. Ne se connaissant pas entre eux, ils ne sont pas non plus certains de pouvoir se faire confiance. D’un point de vue de MJ, c’est assez jubilatoire à observer.

  • L’amnésie : voilà un autre scénario amusant pour le MJ. Il réclame toutefois une grosse préparation. Les PJ se réveillent au même endroit. Ils ne se connaissent pas. Ils se souviennent de qui ils sont mais absolument pas comment ils sont arrivés ici, comment ils se sont rencontrés et même ce qu’ils ont fait ces derniers temps (comptez en jour, semaine, mois voire année selon vos besoin). Qu’on-t-il fait ces derniers temps ? Pour qui ? Et pourquoi ? Et qui sont ses types avec lesquels ils se sont réveillés ? L’univers du jeu fournira la méthode de manipulation et d’amnésie (hypnose, pouvoir magique, implant cybernétique…). Bien entendu, les PJ vont devoir assumer les conséquences de leurs actes passés, illégaux la plupart, et retrouver l’auteur de la manipulation.

Voilà les principaux scénarios de rencontre que j’ai expérimenté. Il peuvent être pris pour des scénarios d’une partie ou comme prélude à une campagne. Normalement, à la fin d’un tel scénario les PJ se connaissent bien et leur aventure en commun a créé des liens suffisants pour qu’ils forment un groupe ayant l’envie de poursuivre des aventures en commun. Il faut dire que ces scénarios ne laissent pas beaucoup d’alternatives à la collaboration : c’est ça le secret.

Certains de ces scénarios feront l’objet d’un chapitre plus complet.

L’IMPROVISATION

 

Souvenez-vous. Souvenez-vous de cette première partie de Jeu de Rôle que vous avez masterisé avec un scénario du commerce. Vous aviez bien lu le livre de règles, fait consciencieusement les fiches de personnage, et lu plusieurs fois le scénario à le connaître par cœur. Ce scénario qui décrivait les lieux, les événements, les PNJs, bref qui avait tout prévu. Tout ?

Rappelez-vous de votre joueur qui vous pose une question ou qui décide d’explorer tel lieu, et de vous apercevoir qu’il n’y a rien dans le scénario à ce sujet. Rappelez-vous de ce petit sentiment de panique mêlé de confusion vous demandant : « c’est pas prévu, qu’est-ce que je vais faire ??? »

On peut bredouiller : « je ne sais pas, c’est pas marqué ». Mais sachez qu’en tant que MJ, ça le fait pas. Alors, une seule solution : l’improvisation.

Et contrairement à ce qui pourrait être évident, l’improvisation, ça ne s’improvise pas, ça se prépare. Pour pouvoir avoir réponse à tout, il faut bien connaître son sujet. Donc, on recommence le petit jeu des questions-réponses.

Les lieux :

Où vont les joueurs ? Comment ? Quel est la disposition des lieux ? Qu’est-ce qui est accessible ? Par quels moyens ?

Il faut être réaliste : on ne trouve pas de tout, partout. Réfléchissez bien à la fonction des lieux : dans un village minier, on peut trouver ce que l’on veut en matière d’outillage, mais pour l’armement cela se limitera à la chasse ; un vaisseau spatial emporte, normalement, tout ce qui est nécessaire pour son voyage, mais est limité pour le superflu. Il ne faut pas hésiter à dire aux joueurs : « hey, rappelle-toi où tu es ? »

Les PNJs :

En règle générale, ce sont les habitants du cru que vont rencontrer les PJ. Ils sont caractérisés comme suit : quel est leur profession ? Leurs biens ? Qu’est-ce qui les motive dans la vie ? Quel est leur personnalité ? Le dernier point permet au MJ de gérer des joueurs trop entreprenants : une personne acariâtre enverra promener les joueurs à la troisième question, alors qu’une personne gentille et serviable trouvera toujours quelque chose à dire même si cela n’a rien à voir avec la question (n’hésitez pas à balancer les ragots de tout le voisinage). Vous pouvez aussi vous amusez à interpréter un PNJ stupide qui ne comprend rien à rien : après un dialogue sur-réaliste, ils sauront qu’ils n’ont rien à apprendre de lui. Il se peut tout simplement que les gens interrogés ne savent rien et ne soient d’aucune utilité : dites-le. Si les PJ souhaitent recevoir un coup de main, n’oubliez pas que les personnes aventureuses sont rares, la plupart des gens veulent vivre une vie tranquille et ne risqueront certainement pas leur vie pour des étrangers, si charmants soient-ils. Dans le cas où les joueurs les forceraient à les accompagner (en les menaçant par exemple), ils fuiront à la première occasion, tout simplement.

Pour conclure, restez logique et vraisemblable. C’est les joueurs qui doivent trouver les solutions pas les PNJ. Et s’ils s’égarent, laissez-les se perdre un moment puis faites-leur comprendre qu’ils sont dans une impasse. Vous n’êtes pas obligé de tout prévoir, vos joueurs auront, de toutes manières, plus d’idées que vous. Suivez-les dans leurs élucubrations et lorsque toutes les réponses qu’ils obtiendront de vous seront négatives, ils réintégreront les bornes de votre scénario.